Sur le pont camarade

Discours de Rémy Blanc au meeting unitaire du vendredi 10 février 2023

La Nupes tenait un meeting le vendredi 10 février à la Salle du Château de St Chamand pour décrypter la réforme de la retraite . Mission remplie, salle pleine ! Les différents intervenants se sont bien complétés. Pour Le PCF84 intervenait Rémy Blanc, militant Morièrois, remplaçant au Conseil Départemental du Vaucluse.

Chers camarades,

Je voudrais introduire mon intervention en rappelant la somme importante des cotisations sociales en France, elles ouvrent des droits aux pensions de retraite et représentent environ 335 milliards par an.

Nos caisses de retraite sont encore administrées par les représentants des salariés au sein d’organismes paritaires et à but non lucratif.

C’est un héritage du conseil national de la résistance.

Rémy Blanc

Au sein de ces caisses, les intérêts des salariés sont défendus et entendus. Ma volonté, en engageant ma réflexion sur ce rappel historique et sur le volume financier que représente notre système de retraite, a deux objectifs :

 Le premier est de mettre évidence le caractère protecteur de la construction de notre système de retraite par répartition au regard des sommes administrés. Les droits et les intérêts des travailleurs sont au centre des institutions par le fait que la moitié des sièges sont détenus par les représentants des salariés. On est en droit d’espérer que les pensions des retraites soient protégés par ces derniers.

– Le deuxième objectif est de mettre en évidence l’énorme manne financière qui échappe aujourd’hui à la puissance capitaliste. Notre système actuel de retraite, qui fait figure d’exception dans cette mondialisation, ne permet pas aux groupes financiers de spéculer sur le dos des travailleurs.

L’attachement à notre système solidaire par répartition est encré dans le patrimoine national et les Français ne sont absolument pas disposés à le remettre en question.

Franc succès pour le meeting de la Nupes

Le gouvernement s’y est résigné en renonçant, dans un langage technocratique, à une réforme systémique et n’a pas osé s’attaquer à cet édifice social.

La stratégie est bien plus perfide et il nous appartient, à nous les forces de gauche, de savoir en décrypter tous les enjeux pour les faire éclater au grand jour et en combattre point par point l’idéologie.

Au-delà des économies qu’ils veulent réaliser sur la branche retraite pour équilibrer le budget de l’État suite au 50 milliards d’euros par an de baisses d’impôts, de baisses de cotisations pour les plus riches et les grandes entreprises.

Des éléments et des arguments contre la réforme qui sont un des aspects de la lutte qu’il faut faire entendre le plus largement possible.

Nous les avons déjà évoqués et le ministre de l’Économie lui-même ne se cache pas de son intention de réduire le déficit public en réalisant des économies sur le dos du système des retraites.

Le stand du PCF 84

Mais le pire, ce n’est peut-être pas ce que l’on voit ou ce que l’on entend, c’est peut-être ce que l’on ne voit pas et que l’on n’entend pas…

Ce que nous devons conjointement dénoncer, c’est la manipulation du chef de l’État qui cherche à induire une désespérance et une perte de confiance en notre système de retraite. Il ne veut plus le déstructurer, il veut le rendre obsolète aux yeux des salariés. Pour cela, il veut en durcir les conditions d’accès, et toujours dans un langage technocratique, c’est ce qu’ils appellent la réforme paramétrique.

Il est facile de se rendre compte de cet impact notamment chez certains jeunes, qui vous dise, en première intention qu’avec toutes ces réformes, ils n’auront pas de retraite dans ce système actuel. Ce qui sous entend qu’il faudra trouver d’autres solutions de financement. Avec la mise en œuvre de la mesure, comment leur donner totalement tort puisque l’espérance de vie en bonne santé est de 64 ans et 4 mois. En reportant l’âge légal à 64 ans, un homme passerait en moyenne 4 mois de sa retraite en pleine santé.

Mais la réforme prévoit également :

une augmentation brutale de la durée de cotisation pour une pension à « taux plein »

c’est un déni de prise en considération de la pénibilité du travail, jusque dans sa sémantique,

c’est aucune prise en considération des carrières hachées, des temps partiels imposés,

c’est aucune mesure pour les inégalités salariales entre les hommes et les femmes et donc par conséquence sur les pensions,

c’est une disparition des régimes spéciaux avec un alignement par le bas…

Tout un arsenal qui vient fragiliser et rendre plus difficile un accès à la retraite.

Sans en afficher la couleur et insidieusement on prépare le terrain pour détourner les Français d’un système par répartition juste et solidaire pour les orienter vers un système de cotisations individuelles par capitalisation.

Il me semble important, pour analyser et mesurer les enjeux sociétaux de cette réforme des retraites, de se replonger quelques années en arrière quand le gouvernement a fait voter en 2019 la loi Pacte. Pour illustrer mon propos, je voudrais vous lire quelques lignes que j’ai trouvées le plus simplement du monde sur le site de Blackrock France.

Blackrock n’est autre qu’une entreprise américaine, gestionnaire d’actifs côtés en bourse dans le monde entier. Il pèse 8,59 mille milliards de dollars d’actifs. Un nombre que je n’arrive même pas à prononcer tellement il y a de zéro qui s’enchaînent. Un mastodonte de la finance qui arrive à faire trembler à la BCE (Banque Centrale Européenne) par son pouvoir d’influence sur les marchés financiers.

Un philanthrope, pétri de bonnes intentions pour l’humanité !

Je vous lis, Ouvrez les guillemets :

«  Pourquoi la loi Pacte ?

La loi Pacte vise spécifiquement à combler les lacunes structurelles des régimes d’épargne retraite volontaire existants.

Elle permet à l’épargnant :

  • de bénéficier d’allègements fiscaux pour les cotisations versées en réduisant sa base imposable,
  • d’accéder à son capital avant la retraite,
  • d’opter librement pour une sortie en rente ou un retrait du capital de transférer son patrimoine à une entité plus concurrentielle sans frais de transfert,
  • et de bénéficier automatiquement de solutions d’investissement efficaces comme la gestion pilotée pendant toute la phase d’accumulation. »

Si on se demandait encore à quoi servez la loi PACTE, Blackrock est là pour vous éclairer.

Après ces quelques lignes, on comprend les intentions de groupes spéculatifs comme Blackrock qui comptent bien capitaliser sur le marché des retraites en France. Ils vont s’engouffrer dans toutes les opportunités qui leur sont données par la loi PACTE d’un côté, et développer toutes les stratégies de communication de l’autre pour ferrer les désillusions induites par la réforme des retraites, que le gouvernement veut nous imposer.

Deux réformes comme les deux faces d’une même pièce pour sacrifier notre modèle de retraite.

La retraite est un marché extrêmement porteur qui depuis tout ce temps fait des envieux et elle est l’objet de bien des attentions des organismes spéculatifs. Ces derniers ne voient qu’une opportunité de s’enrichir toujours plus et au mépris de nos pensions de retraite. Dans ces structures, ce sont les intérêts des actionnaires et la puissance de l’argent qui gouvernent. Les petits épargnants ne représentent et ne pèsent en rien. Ils seront sacrifiés, relayés, bafoués à la moindre opportunité pour générer des profits.

Nous sommes bien loin de l’idéologie de conseil national de la résistance lorsqu’ils ont bâti la sécurité sociale. Nous sommes également bien loin de la gestion paritaire et non lucrative des caisses de retraites.

La vision politique de ce gouvernement et du chef de l’État est belle et bien d’offrir en pâture les retraites des salariés au système capitaliste et aux ultra-libéraux pour toujours plus de profits.

Refuser la réforme des retraites de ce gouvernement c’est empêcher cette vison de notre société de demain, où notre avenir, nos retraites seraient entre les mains des marchés financiers. Soumis aux aléas des crises financières, des caprices boursiers et des actionnaires. En ce domaine, la seule règle qui prévaut, c’est l’appât du gain.

Malheureusement face à tel risque, les ambitions ne sont pas affichées et les seuls éléments de langage du gouvernement consistent à agiter le risque de faillite du système actuel. Là encore c’est une supercherie qui est à l’œuvre. Des 344 pages du rapport de septembre 2022 du COR, le Conseil d’Orientation des Retraites, je retiendrai cette phrase conclusive :

Je vous lis, Ouvrez les guillemets : «  ... les résultats de ce rapport ne valident pas le bien-fondé des discours qui mettent en avant l’idée d’une dynamique non contrôlée des dépenses de retraite  ».

Je crois que l’on ne peut pas être plus explicite et que les véritables intentions ne sont pas une sauvegarde du système mais une volonté de sacrifier les retraites par répartition pour tenter de compenser les 50 milliards de cadeaux fiscaux par an et d’ouvrir largement le champ à la capitalisation individuelle.

Enfin, je voudrais remettre en perspective la réforme de l’assurance chômage entrée en vigueur le 1er février dernier. L’ensemble des accès aux droits ont été durcis et amoindris. Les seniors, pour ne parle que d’eux, ont perdu en moyenne 9 mois d’indemnisation alors que nous connaissons le contexte et les difficultés de maintien dans l’emploi de ces derniers. Le projet de réforme des retraites prévue par l’exécutif terminera de les envoyer tout droit vers les minima sociaux.

Et ce n’est pas l’article sur l’index senior contenu dans la réforme qui influencera la tendance. Il consistait à contraindre les entreprises par la simple publication d’indicateurs (maintien dans l’emploi et recrutement des seniors). Mais je parle déjà à l’imparfait puisqu’il a suffi de quelques appels du pied du MEDEF pour faire reculer le gouvernement sur leur mesurette. Quelle infamie au regard de la mobilisation massive des travailleurs, des millions de personnes dans la rue, en grève pour faire entendre notre opposition à cette réforme injuste et antisociale.

Je conclurai mon intervention en essayant de répondre à la question suivante :

Quelle est la fonction de ces réformes mises en œuvre par le chef de l’État ?

Durcir les conditions d’accès et d’indemnisation à l’assurance-chômage, Rendre toujours plus difficile l’accès à la retraite, conduit à vouloir discipliner le monde du travail dans le seul intérêt du capital.

Je vous remercie de votre attention et on continue la lutte !

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