Sur le pont camarade

Intervention d’André Castelli au Conseil Départemental du 7 octobre à propos de la délibération Fusion/Absorption Vallis-Habitat- GDH.

André Castelli / conseiller départemental PCF

La délibération qui nous est présentée  porte une grande contradiction. Elle aurait dû être la première pour l’ouverture d’un grand débat public sur les intentions et propositions de la majorité,  mais en fait elle est la dernière.

Il aurait dû appartenir à la collectivité et à ses élus de débattre en priorité et en amont autour des grandes questions qui construisent cette délibération : 

-Devons-nous garder notre OPH (Office Public de l’Habitat) ou nous en séparer ?

-Est-ce nécessaire de piloter un service public social de l’habitat ou non? 

-Est-ce qu’il y a un lien entre notre Office Public de l’Habitat et les politiques sociales que nous attribuent nos compétences ? 

-Notre collectivité est-elle un outil du Service Public ou non ? 

Autant de questions qui sont à mon sens celles du courage, de la responsabilité, celles qui déterminent un choix et imposent de l’assumer. Reste  ensuite à partir du  débat et de la décision, le lancement de la concertation et enfin de la décision.

Mais vous avez choisi un chemin inverse Mme la Présidente. Vous avez lancé un débat, très personnalisé, détourné et en plus qui n’a jamais fait partie de votre programme local ou départemental. Ainsi depuis ces derniers mois vous faites des annonces, vous lancez des informations et tout cela dans la précipitation en imposant que deux organismes dont le nôtre se mettent en effervescence allant jusqu’au vote de leur Conseil d’Administration. Ce qui revient à dire : ce n’est pas moi c’est eux qui ont décidé dans leurs instances que l’un mange l’autre. 

Et tout cela dans une précipitation et avec une rapidité assez inaccoutumée !

Cette force avec laquelle vous avez décidé de la fin de notre service public départemental a même de quoi inquiéter sur l’avenir de quelques autres compétences publiques de notre collectivité. J’espère par exemple que la Protection Maternelle Infantile  n’est pas privatisable, ou quelque autre service du côté des routes fusionable puisque déjà décentralisable ou l’accueil pour la protection de l’enfance absorbable. On sait ce qu’il en est déjà des politiques sur le Grand’âge. 

Se séparer en effet d’un service public de l’habitat dans un département qui est classé parmi les plus économiquement et socialement pauvres de France : cela a de quoi laisser pantois les observateurs attentifs et autres analystes sociaux qui risquent de trouver dans ce choix une marque totalement décalée puisque dans leur grande majorité ils tiennent un discours inverse.  Mais surtout cela est de nature à faire craindre que peut-être le pire est à venir. 

Ainsi Mme la Présidente, vous vous apprêtez à entrer dans l’histoire de notre Département par un chemin pour le moins inattendu m’obligeant à m’interroger sur cette raison devenue obsessionnelle de se débarrasser de la gestion et de la mission de Vallis-Habitat. Un débarrassement (le mot existe dans nos dictionnaires !!) surtout, qui ne correspond pas à l’attention que vous portez par ailleurs pour l’ensemble de votre mission et celle de votre majorité. Nous sommes là dans une autre contradiction.

Mais que s’est-il donc passé pour que vous en veniez à cette décision ?

  Notre département et surtout sa population dans sa diversité, avec les défis qui lui sont posés et notamment dans son aménagement à réaliser avec nos outils de solidarité, a besoin non pas d’un signe d’abandon d’un service public mais au contraire d’un signe de renforcement de service public. 

Depuis six mois, Mme la présidente vous donnez un signe inverse à ce que vous prétendez faire et je le répète, incapable d’en cerner la raison profonde, j’en suis toujours au questionnement. (J’espère que l’on ne vous a pas suggéré l’idée de porter la création de la première ESH du Vaucluse (Entreprise-privée- Sociale pour l’Habitat) après avoir été convaincue par les abstentionnistes aux Conseils d’Administrations qui se sont tenus ?. Auquel cas vous démontriez le pire, c’est-à-dire que la fusion, serait une opération au service d’intérêts privés nourrissant le capital nuisible aux intérêts des locataires.)

Et serait-ce cela qui vous fait avancer si vite, que vous marchez en balayant les procédures réglementaires qui remplissent la corbeille de l’illégalité ? J’y reviendrais brièvement.

Mais surtout, vous marchez avec une telle volonté de vous débarrasser de cet outil que les discussions qui se sont engagées mettent à mal des femmes et des hommes, de statuts privés ou publics , de catégories de tous niveaux , des agents intervenants sur le terrain jusqu’aux agents de directions , avec des mots qui contestent leurs compétences et leurs responsabilités. Y compris des acteurs de votre propre majorité quand, par exemple, vous niez la capacité de l’office à mettre œuvre une politique moderne de l’habitat, quand vous déclarez que les moyens financiers de l’office sont si mauvais qu’il ne peut envisager de déployer une politique adaptée, ce qui est totalement faux comme le démontrent tous les rapports à disposition. Mais vous mettez également à mal les locataires, au cœur de la problématique et des enjeux. Des locataires en place mais aussi des locataires à venir.

Comment avez-vous fait pour diagnostiquer que Vallis Habitat avait la rage et prescrire la nécessité de mettre fin à sa vie ? Si cela avait été le cas, mais les vétérinaires de l’Agence Nationale de Contrôle du Logement Social (ANCOLS) vous aurez alerté depuis longtemps et les  présidences de l’Office auraient reçu depuis, l’ordonnance de soins immédiats. Or, ce n’est pas le cas. D’ailleurs, une preuve que l’ANCOLS est capable de diagnostic et de prescription, c’est le document concernant le bailleur pressenti pour l’absorption, republié ces derniers jours et qui alerte, je cite:

« Le département de Vaucluse, berceau de la société, est moins prioritaire dans sa stratégie de croissance. Celle-ci doit s’accompagner d’une réflexion sur l’organisation de la gestion de proximité. »

Ce diagnostic est à l’inverse de ce que vous-même, dîtes attendre de l’absorption. Une autre contradiction !

Il est bien évident, je vous l’accorde, que des améliorations sont nécessaires pour mieux répondre aux usagers locataires de notre service public. Il est évident que les enjeux du moment exigent de nouvelles formes de coopérations. Mais il est tout autant évident que cela est possible pour notre Office Public qui a les compétences pour réfléchir, gérer et remplir sa mission fondamentale. Il est évident que la réussite du programme de rénovation urbaine  de l’habitat du Département doit se faire dans un processus de coopération qui pourrait se concrétiser par une procédure conventionnelle innovante telle que la loi le permet. Qui va nier cela ?  Mais faire disparaître notre Office est une hérésie totale et à contre-courant des possibilités et exigences du Vaucluse. C’est un affaiblissement qui ne sera pas sans conséquences. 

Je terminerais par les travers dans lesquels votre précipitation vous a entraîné. Il s’agit en fait d’une somme importante de procédures, tellement trop vite engagées qu’elles ne pourront pas passer soit au contrôle de légalité  soit au Tribunal Administratif, soit aux deux. 

Ainsi aujourd’hui, vous allez présenter une  délibération conjointe sur la création de postes pour les agents de Vallis Habitat et les détacher à l’autre bailleur. Mais votre délibération ne résistera pas à l’examen du contrôle de légalité : elle n’est pas budgétisée, ce n’est donc pas une création d’emplois ; c’est plutôt l’ouverture d’un vide, alors que vous devrez engager un processus de mutation des agents dont les postes doivent être budgétisés. Chaque agent doit faire l’objet d’un arrêté de mutation et ensuite lui seul peut demander un détachement. C’est l’élémentaire du statut que les services de la légalité de la préfecture vous inviteront à respecter. Et chaque agent qui ne souhaitera pas être détaché conservera alors son poste par annulation de la mutation. Je doute que la préfecture vous laisse vous aventurer dans une jurisprudence pouvant avoir d’énormes conséquences. De la même manière, les textes signés avant que les CA des organismes n’aient délibéré, vont devoir être revus. Des révisions qui vont obliger de nouvelles séances aux contours incertains. 

C’est donc à la raison que je vous invite dans ce débat, qui je le répète, est historique. D’autres voies sont possibles et de nature à ouvrir des possibilités pour répondre aux besoins. Il y a des propositions qui existent en ce sens. Nous aurions dû débuter de cette manière. Il y a dans notre département des organismes qui sont de nature à retenir des hypothèses, énoncer des données, pour nous aider à la décision 

Vous devez le comprendre Mme le Présidente, c’est à un vote de responsabilité publique que nous vous appelons, ainsi que toutes et tous les élues-s.

1 réflexion au sujet de « Intervention d’André Castelli au Conseil Départemental du 7 octobre à propos de la délibération Fusion/Absorption Vallis-Habitat- GDH. »

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